11/08/2013
André Frénaud, Les Rois Mages
La création de soi
Mes bêtes de la nuit qui venaient boire à la surface,
j'en ai harponné qui fuyaient,
je les ai conduites à la maison.
Vous êtes ma chair et mon sang.
Je vous appelle par votre nom, le mien.
Je mange le miel qui fut venin.
J'en ferai commerce et discours, si je veux.
Et je sais que je n'épuiserai pas vos dons,
vermine habile à me cribler de flèches.
André Frénaud, Les Rois Mages, Poésie / Gallimard,
1987 [1977], p. 67.
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10/08/2013
André Frénaud, La Sainte Face
Bon an, mal an
Bon an mal an,
bon gré mal gré,
bon pied bon œil,
toujours pareil,
toujours tout neuf,
c'est toujours vrai,
c'est toujours vain,
ça persévère,
ça s'exaspère,
ça prend son temps,
ça va briller,
ça s'inscrira,
indescriptible,
perdu ravi,
malheur gaieté,
le pour le contre,
la fin la suite,
commencement,
flamme épineuse,
contour changeant,
la mort qui tousse,
qui se ravive
au goût du vif,
la mort, la joie,
m'épuisant à rire
dans cet hôtel jaune,
dans ce lit de fer,
éclairé jusqu'où,
feuille tombée vivante
d'un sommeil sans rêve
au milieu de toi,
promesse souterraine,
pousse nourricière,
douce comme le bleu.
Marseille-Lyon, 14 mars 1949
André Frénaud, La Sainte Face, Poésie /
Gallimard, 1985 [1968], p. 165-166.
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09/08/2013
André Frénaud, Depuis toujours déjà
Ecco me
À force de l'aimer saurai-je la contraindre ?
A-t-il brillé pour moi le vrai regard ?
Qui voulais-je prouver ? Où me perdre ? Où me prendre ?
Mais à qui fut jamais promise, quelle ?
Ô ci-devant vainqueur, contre toi le temps gagne.
Aurai-je assez menti !
J'ai retrouvé la déchirure inoubliable.
L'enfance qui m'accompagnait, les yeux perdus,
s'est redressée avec son vrai visage : c'est moi.
J'ai bouclé ma vie, j'ai achevé le tour, découvrant
la pesante encolure de ma mort.
André Frénaud, Depuis toujours déjà [1970], dans La Sorcière de
Rome, Depuis toujours déjà, Poésie / Gallimard, 1984, p. 136.
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08/08/2013
André Frénaud, Il n'y a pas de paradis
Note sur l'expérience poétique
Le poème dépasse celui qui le forme, mais enfin il l'exprime ! En construisant cet objet-microcosme, l'auteur se construit et se découvre différent — et uni au monde par des liens différents — mais il se connaît encore tel qu'il est, avec ses ressources qui sont ses limites, sa profondeur légère.
Ces petits monuments verbaux imprévus, la conscience qui les a portés c'est celle de tel homme unique avec son expérience et ses désirs, ses monstres et ses valeurs, tout ce qui dans la vie l'a marqué et ce qui demeure irréductible, avec ses goûts, son intelligence, ses traditions, ses partis-pris et ses mots, avec son courage et sa misère propre. De là que chaque créateur a ses thèmes et son style. Et, bien sûr, le poème se fait dans la durée changeante d'une vie. S'il opère toujours une transfiguration (jusque par la raillerie même), l'œuvre prend une tonalité différente selon la part de la sensibilité qui s'y trouve actualisée dans le dépassement. Ainsi la plus haute joie et le simple plaisir, l'émerveillement, la nostalgie, l'amertume ou le désespoir, la révolte et la rage, la bonté, tous les sentiments éprouvables peuvent-ils tour à tour y prédominer.
André Frénaud, Il n'y a pas de paradis, Poésie / Gallimard, 1967 [1962], p. 241-242.
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07/08/2013
André Frénaud, Hæres, poèmes 1968-1981
Feu originel
I
L'amour brûle, il n'est personne.
*
Le centre est partout, il est interdit.
*
Ce qui s'était allumé à jamais
de toujours s'obscurcissait.
*
Montaient l'arbre et l'aubier pour le fourmillement.
*
Le bruissement de l'origine,
l'incessant, l'incertain.
et qui ne se distinguerait pas de la finalité
inconnaissable.
*
Ne discontinuait pas de se faire imminent
ce qui encore se différait.
*
Si lui ne la voit pas et ne l'a jamais
dans sa vie, reconnue
la Joie
tout à coup s'éleva de son œuvre
et le marque.
André Frénaud, Hæres, poèmes 1968-1981, Gallimard,
1982, p. 221-222.
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06/08/2013
André Frénaud, Hæres, poèmes 1968-1981
Rumination du paysan
Je veux grossir pour défendre ma vie.
Contre la mort il faut prendre du poids,
il me faut boire des six litres
et pisser,
pour ma santé,
pour honorer ma santé et ma vie.
Il me faut vivre pour accroître mon bien,
peser les bêtes, arroser les clôtures,
renforcer les semences, affûter les outils,
bourrer le temps.
Mais le dimanche, on peut fanfaronner
avec l'alouette et la violette.
1959
Marmonnement du petit vieux
Cache-toi
Couve tes maladies.
Le soleil ne te veut pas de bien.
Descends dans la cave.
On pourrait te les prendre.
Profites-en tout seul...
Tu risquerais d'y voir clair.
N'aie pas peur... Un jour
Tout ça finira bien par éclater.
Bouche innocente
Au bon petit cheval, ainsi se glorifiait
la boucherie hippophagique... Et aussi bien,
ne pouvait-il manquer d'être satisfait, l'innocent,
d'être mort et mangé, et dans le poids d'un homme.
Rue Vieille-du-Temple
André Frénaud, Hæres poèmes 1968-1981, Gallimard, 1982, p. 105, 106, 111.
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05/08/2013
André Frénaud, La Sainte Face
La secrète machine
C'est la secrète machine.
C'est un piège inspiré.
C'était une échauffourée.
Ce n'est qu'un miroir au rats.
C'était une provocation.
C'est le coursier effréné.
C'était une médecine.
Mais c'est un cheval de Troie !
C'était pour capter l'eau vive.
C'était la fabuleuse prairie.
C'est l'élection de la mort.
Ce n'est qu'un étranglement.
C'était le captif enragé.
C'était en gésine un bon ange.
Ou serait-ce l'arbre attentif
et le vent du Levant ?
Tel est perdu qui croyait prendre.
L'autre ou toi, lequel est-ce ?
Ce n'était qu'une parure.
C'était peut-être une prière.
C'était une rédemption.
Un ensevelissement.
1er novembre 1965
André Frénaud, La Sainte Face, Poésie / Gallimard,
1985 [1968], p. 201-202.
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04/08/2013
André Frénaud, Il n'y a pas de paradis
Si l'amour fut
Mon amour, était-ce toi ou mon seul élan,
le nom que ma parole a donné à son désir.
As-tu existé, toi l'autre ? Était-il véritable,
sous de larges pommiers entre les pignons,
ce long corps étendu tant d'années ?
L'amour a-t-il été un vrai morceau du temps ?
N'ai-je pas imaginé une vacance dans l'opaque ?
Étais-tu venue, toi qui t'en es allée ?
Ai-je été ce feu qui s'avive, disparut ?
Tout est si loin. L'absence brûle encore la glace.
Les ramures de mémoire ont charbonné.
Je suis arrêté pour jusqu'à la fin ici,
avec un souvenir qui n'a plus de figure.
Si c'est un rêve qu'éternel amour,
qu'importe j'y tiens.
J'y suis tenu ou je m'y trouve abandonné.
Désert irrémédiable et la creuse fierté.
Quand tu reviendras avec un autre visage,
je ne te reconnais pas, je ne sais plus voir, tout n'est rien.
Hier fut. Il était mêlé de bleu et frémissait,
ordonnancé par un regard qui change.
Une chevelure brillait, violemment dénouée,
recomposée autour de moi, je le croyais.
Le temps remuait parmi l'herbe souterraine.
Éclairés de colère et de rire, les jours battaient.
Hier fut.
Avant que tout ne s'ébranlât un amour a duré,
verbe qui fut vivant, humain amour mortel.
Mon amour qui tremblait par la nuit incertaine.
Mon amour cautionné dans l'œil de la tempête
et qui s'est renversé.
André Frénaud, Il n'y a pas de paradis, Poésie / Gallimard,
1967, p. 174-175.
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15/06/2013
André Frénaud, Les Rois mages
Paris
à Jean Follain
Gâtée par le soleil tout à coup,
la façade pousse un rire frais.
Pignons où s'emmêlent
des rêves de plusieurs âges.
Tant de patientes imaginations
sur l'avenir des filles, différant
de la réalité de leur avenir,
passé maintenant
avec les filles de leurs filles,
et les ducats et les louis
sont devenus papier monnaie.
On ne porte plus la fraise à l'espagnole,
ni plumes d'autruches ni le chinchilla.
Le vin a été bu par les nouveaux locataires.
On a changé les lustres à pendeloques,
le chaudron, la couleur des cheveux...
La chevelure magnétique du sommeil,
méduse haletante à mille feux de serpents.
Visage net au matin, bonjour mon époux.
Ravalement, avalisant
l'amère joie de vivre
dans les jours quotidiens qui nous trompent
encore demain.
Façade,
à cet instant bleue et rose.
André Frénaud, Les Rois mages[1977], suivi de L'étape dans la clairière [1966], Poésie / Gallimard, 1907, 57-58.
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21/04/2013
André Frénaud, La Sainte Face, Nul ne s'égare
La vie est comme ça
— Ça ne tache pas, c'est du vin rouge
— Ça vous fera plaisir, c'est du sang
— Ça ne lui fera pas de mal, ce n'est qu'un enfant
— Ça ne vous regarde pas, c'est la vérité
— Çane vous touche pas, c'est votre vie
— Ça ne vous blessera pas c'est l'amour
André Frénaud, La Sainte Face, Poésie / Gallimard, 1985
(1968), p. 77.
Une passante
L'altière, le grand lévrier,
sa longue chevelure,
sur la pointe des pieds, dans les fourrures,
traversant le monde éclipsé...
Elle est repartie sans être venue,
emportant l'éblouissant désastre.
Des astres. Des astres. Des fleurs défaites.
Pour apurer les comptes
Ce n'est rien, donne-moi l'addition, c'est gratuit.
C'est toujours rien, tout est payé, ta vie aussi.
Tout est donné et tout repris. Mais va-t-en donc.
Pourquoi trembler, ou te vanter, t'émerveiller ?
Pourquoi mentir et ressasser, pourquoi rougir ?
Pourquoi vouloir, ou bien valoir ? Pour être qui ?
Ce n'est rien, ce ne fut jamais rien, c'est la vie.
Céder, chanter. Tout vient, s'en va, pourquoi te plaindre
si le dieu qui n'est pas paie tout ? Mais pourquoi vivre ?
André Frénaud, Nul ne s'égare [1982], précédé de Haeres 1986], Poésie / Gallimard, 2006, p. 267, 273.
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21/02/2013
André Frénaud, Les Rois mages
Pays perdu
Mon pays d'enfance,
oh ! si loin de moi !
Ô sillon parallèle
quand je te revois, bête
sans croupe ni crinière.
Les jardins maraîchers,
les remblais du canal,
bâtiments ferroviaires,
les vieillards presbytes,
la cloche du presbytères,
le veuf sort de l'épicerie,
s'en va au cimetière,
les garçons et les filles.
Mais où donc est-il ?
Qui me conduira ?
... Il y avait une voiture à cheval
encapuchonnée, certain tintement.
Au détour de la crête, le château disparaît,
en tuiles grise, et le vent de bruine
le vêt, d'osier et des fleurs du sureau.
Le mordu ricane derrière le mur.
Seul je vois l'oiseau dans la mousse,
aux pattes velues... Il faut dormir.
J'ai entendu un cri... Le tonnerre
assombrit la carriole.
En vain j'attends dans la boue noire,
pays de houille et de mamelons niais.
Ici, il n'y a plus d'autrefois.
André Frénaud, Les Rois mages, suivi de L'Étape
dans la clairière, Poésie Gallimard, 1987, p. 52-53.
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25/12/2012
André Frénaud, Hæres
Scène de théâtre sur la place
Deux ou trois filles à califourchon au sommet de l'escalier à double rampe, sur la tribune baroque adossée à la façade, d'où partaient autrefois les proclamations. Elles sont là qui jabotent, elles tapotent la vieille pierre de leurs jambes gainées de cuir.. Et l'on dirait qu'elles tiennent la dragée haute à un petit groupe confus en bas des marches, de soldats et quelques civils qui marmonnent parmi l'obscurité... Ils ne cherchent as à grimper. Tout au plus, entre les niveaux, des bouts de phrase viennent, vont... Se relient-ils... Se relaient-elles ? Allusions blagueuses, effronterie, apeurement... C'est ainsi qu'ils s'entretiennent.
Puis, arrivent des motocyclistes, paradant, pétaradant... qui s'arrêtent, abrupts, chuchotent quelques mots, déjà repartent avec en croupe parfois une fille où un garçon.
Du menu peuple passe, qui rentre chez soi.
C'est à la nuit tombante, sur une place autrefois glorieuse, devant la vieille église qui s'encrasse, le train-train de cette scène recommencée chaque jour pour faire patienter et pour divertir de l'inépuisable, de l'inutile foisonnement...
Ont-ils le sentiment d'amorcer un spectacle ? Il n'y a pas de pièce déjà écrite. Il ne s'en improvisera pas. On pourrait imaginer qu'une fois ou l'autre : sédition massive, affrontements entre quartiers, viols...
Mais cette sorte d'événement saurait-elle résoudre le vide, l'attente interminable ?
André Frénaud, Hæres, Gallimard, 1882.
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26/12/2011
André Frénaud, Hæres
Mais qui a peur ?
Les arbres mouillés,
les armes rouillées,
l'astre dérobé,
le cœur engourdi,
chevaux encerclés,
château disparu,
forêt amoindrie,
accès délaissé,
lisière éperdue,
source dessaisie,
— la neige sourit.
décembre 1974
L'homme
L'homme
exposé
retourne
à l'origine
à la Mère
est jeté
en défi
au Destin
hors des lieux
par instants
adoptifs.
Origine de l'œuf
L'œuf se ferme-t-il ou bien s'ouvrira-t-il ?
L'aube traversera-t-elle
ces frondaisons épaisses de la nuit ?
Ou si le couchant s'appesantit décidément, si le globe
s'entoure de cernes concentriques, de paupières,
l'une après l'autre qui se fermeront,
rapetissant puis annulant
ce point qui étincela comme jamais, un instant bref,
et qui n'en finit pas de disparaître,
ce point, peut-être, qui est là de nouveau,
qui grandit.
L'œuf qui se précise passera-t-il par ce poisson
pour nous faire advenir ?
C'était déjà la fin. Et c'est encore la fin.
C'est encore le retour, ou déjà le retour.
André Frénaud, Hæres [1982], p. 147, 189, et
Nul ne s'égare, p. 260, dans Nul ne s'égare [1986],
précédé de Hæres, préface d'Yves Bonnefoy,
Poésie / Gallimard, 2006.
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29/08/2011
André Frénaud, Hæres
La double origine du langage
à Alain Lévêque
Le perdu inoubliable, inconnu,
le sein où j’avais part, originel,
j’essaie avec ma langue,
et cette rumeur dans l’oreille qu’elle fomente
et qu’il me semble reconnaître,
de recouvrer — oh ! je tâtonnerai — une parole
où être aspiré, respirer,
où me dissiper dans la mer.
… Ou si le discours qui s’acharne,
qui s’arrache de ma bouche,
venait d’un élan sans cesse intimidé,
— et qui se hérisse d’autant plus, qui raffine,
que je n’y arrive pas ! —
pour mimer
la syllabe initiatrice,
dominatrice,
lorsque le père émit
l’univers en mouvement,
où je figure au rôle, ces jours-ci,
d’où je parle.
André frénaud, Hæres 1964-1974, Gallimard, 1982, p. 202.
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26/05/2011
André Frénaud, Nul ne s'égare, Hæres
HÆRES
Il y a, au cœur du poème, derrière le poème, révélé par lui, un magma de multiples formes contraires, qui tournent, s’entrecroisent, se heurtent, veulent s’échapper… Et qui s’échappent, effectivement, en propos obscurs — ce sera le poème — sans ordre apparent, possiblement.
C’est de la réalité cachée de soi qu’il s’agit, et une discontinuité, une incohérence même, qui ne sont pas voulues, peuvent se comprendre comme étant exigées par l’objet qui se forme pour qu’il se forme précisément, celui-ci ne pouvant le faire autrement qu’à sans cesse tourner court et reprendre ailleurs, laissant percer quelque chose parfois d’un foyer incandescent, non maîtrisable, multiples traces reprises d’élan de l’Éros toujours insatisfait, irréductible.
André Frénaud, Nul ne s’égare, précédé de Hæres, préface d’Yves Bonnefoy, Poésie/Gallimard, 2006, p. 58.
La vie comme elle tourne et par exemple
Ça va, ça tourne, c’est débrayé,
depuis toujours ça tourne mal.
Les parties nobles, les parties douces,
la matière grise,
les nouveaux-nés, les chevronnés, les charlatans,
les désolés, les acharnés, les ortolans,
les magiciens, les mécaniciens et les fortiches,
tout est égal et fait du vent.
Tout se dépose et sous la langue fait amertume.
Corps rechignés, amour rendu,
À roue qui tourne, éclats, fumées,
Cela donne soif, faut en convenir.
Ça vous complique et vous recuit.
Ça vous alarme, ça vous suffoque.
Tout se morfond et se déglingue et se raidit.
Se prend, s’enfonce. Vas-y. Va-t-en. La joie, la frime.
La folie calme et les grands cris. Ça prend confiance.
Ça va venir. Parties honteuses, le cœur ballant.
Rêverie pleine et la dent creuse.
Le corps brûlant. Ça reprend vie.
Ça va venir… T’émerveilla…
Ça va venir.
Tout est pour rien.
Tout vaut pour rire.
André Frénaud, Nul ne s’égare, précédé de Hæres, préface d’Yves Bonnefoy, Poésie/Gallimard, 2006, p. 265-266.
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